Éditorial pour la Semaine Sainte 1984
« Il est permis de rêver. » A grands pas, le Jeudi Saint approche. Nous allons fêter le don que Jésus nous a fait : son Corps et son Sang, qu’il nous est possible, par Lui, avec Lui et en Lui, d’offrir au Père aussi souvent que nous le voulons. Dieu nous a gâtés. Malgré les ans qui défilent, cette présence parmi nous de Jésus ne vieillit pas; et dans nos énormes cités que I ’anonymat ronge, l’eucharistie demeure l’ultime et le plus sûr moyen de nous rassembler, nous qui croyons au Christ.
Eh bien, j’ai rêvé, tel le curé de Cucugnan (et je voudrais avoir son génie pour me faire entendre), j’ai rêvé que nous fêtions si honnêtement le Jeudi Saint, cette année, que chaque paroissien — ô merveille s’évertuerait avec succès, dès lors, à être à l’heure à la Messe ! Si je parviens un jour en Paradis, il me faudra trouver pour lui dire mes vérités au premier qui osera déclarer que, pour « avoir la Messe », il suffit
d’arriver l’offertoire. Dans quel évangile voit-on Jude et Thomas mal réveillés n’arriver à la Cène qu’au moment où Jésus prend le pain ? […] Il y a des « cas », soit.
Un accident peut retarder le meilleur fidèle. Mais constatant qu’à chacune de nos messes 70% de ce qui sera l’assistance fait défaut au départ, on s’étonne qu’un tel déluge de calamités puisse inonder chaque semaine et à heures fixes notre malheureux quartier. Gares et aéroports ne semblent pas victimes de ce séisme. […]
On gémit, après ça, de voir trop peu de jeunes à la Messe. Mais notre désinvolture ne leur a probablement pas inspiré un profond respect pour ce qui s’y passe. Nous trouvons que les chants ne varient guère ? On pourrait aisément, avant la Messe, passer deux minutes à en apprendre un nouveau si l’assemblée était rassemblée. Et les lectures seraient plus audibles si les éventuels lecteurs arrivaient assez tôt pour pouvoir les préparer. Seigneur ! Si nos Messes, eu lieu de tourner au self-service hâtif, retrouvaient la chaleur du repas de famille, nous n’aurions perdu ni notre Année Sainte ni notre Jeudi Saint !
p. Hubert Vallet, curé de Sainte-Élisabeth-de-Hongrie en 1984